• Et voilà, un peu plus d'un an après notre article « Mais qui représente le peuple tibétain ? », Jean-Luc Mélenchon commet les mêmes erreurs sur le même plateau devant le même journaliste et finit par sortir les bêtises « habituelles ». Par « bêtises », nous parlons de ses propos sur la question du Tibet et nous garderons bien d'évoquer l’émission dans sa globalité.

    Il y a plus d'un an donc (janvier 2012) dans l'émission « Des Paroles et Des Actes » sur France 2 le leader du Front de Gauche disait ne pas vouloir recevoir de représentant des Tibétains parce ce qu'il [le Dalaï Lama] était un « chef religieux », balayant en une seconde le retrait de la vie politique de ce dernier et l'arrivée à la tête du Gouvernement Tibétain en Exil d'un laïc, issu de l'élection du parlement tibétain en exil : Lobsang Sangay. Cette situation qui n'était déjà pas nouvelle (elle avait près d'un an) était une étape supplémentaire dans la démocratisation et sécularisation de la vie politique tibétaine en exil.

    Mais bon qu'un peuple en exil se dote d'institutions démocratiques et laïques, ça ne semble pas intéresser plus que ça M. Mélenchon qui préfère s'en tenir au schéma tant répété par la propagande chinoise « Du Dalaï Lama souhaitant rétablir une théocratie ».


    Jean-Luc Mélenchon à "Des paroles et des actes... par lepartidegauche

    Un an plus tard donc rebelote, le même schéma prend place dans cette courte séance de l'émission  (à partir de 1:44). Si M. Mélenchon commence par rappeler, à juste titre, que son organisation n'est nullement liée au Parti Communiste Chinois, à l'inverse de l'UMP, les propos suivant ce rappel laissent perplexe et interrogent :

    A 1:45, interpellé sur le fait que des Tibétains réclament l'indépendance et qu'il y a eu plus d'une centaine d'immolations (129 reportées à ce jour) il rétorque « De quels Tibétains vous parlez ? » [insinuant qu'il s'agirait d'une minorité ? Seulement des Tibétains en exil ?] et ajoutant « Quelqu'un a donné la consigne qu'on s'immole par le feu en France il n'y a pas de consigne ». Cette affirmation est fausse, a été maintes fois démentie. Seuls les services de propagande chinoise l'affirment. Par ailleurs, M. Mélenchon oppose les immolations ayant eu lieu au Tibet et celles ayant eu lieu en France (devant des pôle-emploi par exemple), sous-entendant que seules ces dernières étaient des actes spontanés. Dans l’esprit de Jean-Luc Mélenchon, un Tibétain ne peut pas prendre individuellement une décision aussi terrible et radicale ? Il est forcément manipulé par « un donneur de consigne ? ». Qu'insinue-t-il derrière cette déclaration ? Qu'il y a les bonnes et les mauvaises immolations ? Celles de l'Occident éclairé et celles d'autres pays, forcément inspirées par « obscurantisme » ? Qu'un Tibétain est par essence un manipulé et un manipulable ?

    Quel cynisme, quelle indécence !

    Pour nous, qu'elle soit l’œuvre d'un chômeur français, d'un jeune tunisien ou d'un fermier tibétain, l'acte de s'immoler est avant tout la réponse ultime d'individus face à des systèmes (économiques ou politiques) complètement bloqués et figés dans leur autoritarisme. C'est la tragédie de devoir user de son corps et sa vie en dernier recours pour alerter le monde sur sa situation. JAMAIS nous ne nous permettrions de disserter sur la validité de l'immolation d'un chômeur européen pour relativiser celle de Tibétains ou inversement.

    Pour celui qui brandit le mot d'ordre « L'Humain d'Abord », on se demande où se situe l'Humain dans ces propos. Rappelons que parmi les plus de 120 immolé-es, il y a des religieux ET des laïcs (environ les 2/3) : des hommes, des femmes, des jeunes parents, étudiants ou fermiers, résidents ou nomades. Ces actes ne sont pas des actes religieux, jamais l'immolation n'a été considérée comme une pratique bouddhiste. Si elle est pratiquée entre autre par des religieux, et est suivit de cérémonies funéraires (comme pour n'importe quel décès), ce sont bien des actes politiques, ni décidés ni encouragés par les institutions religieuses.

    Ensuite M. Mélenchon dit a propos du Dalaï Lama que son projet consisterait à établir un « Etat théocratique dans lequel l'équivalent de la Charia bouddhiste serait appliqué » et « Expulser ce qu'il appelle « les colons » 100 millions d'habitants »

    Premièrement sur la « théocratie », comme nous l'avions déjà signalé, c'est encore une accusation stupide, émanant directement des service de propagande chinoise. Propagande qui par contre n'a jamais évoqué de « Charia Bouddhiste » qui est pour le coup vraisemblablement née dans l'imagination de M. Mélenchon (et utiliser le terme de « Charia » en France où l'Islam est régulièrement instrumentalisé pour enflammer le débat n'est pas anodin).

    Deuxièmement, à propos des « 100 millions » comme l'a fait remarqué Jean-Paul Ribes dans cet article, « Enfin où le président du Parti de gauche est-il allé chercher que cent millions de Chinois (donc pas des Tibétains !) vivaient au Tibet ? Dans ses pires affabulations statistiques, le gouvernement chinois lui même n’a jamais avancé un chiffre aussi fou. Même en considérant le Tibet dans ses frontières culturelles historiques, un tel chiffre de colons hans ou huis serait difficilement atteint »

    M. Mélenchon exagère donc largement les chiffre (les proportions sont plutôt de 10 millions de Chinois pour 6 millions de Tibétains, devenus donc minoritaires dans leur propre pays) tout en fantasmant un projet d'expulsion pour faire monter la tension. Mais une autre question survient : comment M. Mélenchon appelle-t-il alors les Chinois établis au Tibet si ce ne sont des colons ?

    -Quand on sait que l’installation de populations chinoises au Tibet est encouragé économiquement et fiscalement par les autorités chinoises, que l'industrie, particulièrement touristique, minière et forestière, profite avant tout aux Chinois et souvent contre l'avis des populations tibétaines.

    -Quand on sait que la langue chinoise est la langue officielle pour l'administration au Tibet, que l'enseignement du Tibétain y est toujours constamment restreint.

    -Quand on sait qu'il est interdit aux Tibétains de s'organiser politiquement et que la simple défense de sa culture y est vu comme un acte de séparatisme

    M. Mélenchon qu'est-ce donc que ceci si ce n'est du colonialisme ?

    Quelle définition donnez vous au colonialisme si ça n'est pas celle là ?

    « Je ne veux pas de la Guerre » déclare ensuite M. Mélenchon. Bien, alors il ne devrait pas se satisfaire de villes et villages bouclés par une armée d'occupation et de chars dans les rues.

    Hasard du calendrier, cette émission avait lieu le jour de l'anniversaire du Panchen Lama, plus jeune prisonnier politique du monde, détenu au secret avec sa famille depuis l'âge de 6 ans par les autorités chinoises. Un système politique qui emprisonne un enfant pendant près de 20 ans, voilà ce dont M. Mélenchon ne parle pas et ne veut pas entendre parler.

    A la manifestation qui avait lieu l'après-midi à Paris, un sympathisant Franco-Chilien qui avait fuit avec ses parents la dictature de Pinochet nous confiait : « c'est triste que des gens comme Mélenchon, qui se réclament de l'héritage d'Allende aient cette attitude sur le Tibet. Car au delà des contextes politiques et de qui est « ami ou ennemi des USA », au Tibet comme au Chili en 73, c'est une armée qui terrorise des civils, emprisonne, torture, intimide les familles. Il ne s'agit pas de comparer mais de repérer des logiques communes de répression. Des gens meurent, tout simplement. »

    Où est « L'Humain d'Abord » ?

    Nous savons faire, encore une fois la part des choses entre une organisation et un de ses leaders et renouvelons une fois de plus notre souhait de rencontrer les responsables du Parti de Gauche pour échanger sur la question du Tibet, comme nous avons pu le faire de façon positive avec leurs partenaires du PCF.

    M. Mélenchon, nous ne vous demandons pas d'embrasser la cause du Tibet, simplement de respecter les faits, les chiffres, l'Histoire telle qu'elle est décrite par les chercheurs à travers le monde et non un service de propagande. Tout le monde ne peut pas être spécialiste de la question du Tibet, très peu le sont au final. Il n'y a pas de mal à ne pas tout savoir. C'est mieux que d'inventer ou d'exagérer.

    Cette remarque vaut également pour les journalistes de « Des Paroles et Des Actes », qui une fois de plus, malgré la documentation que nous leur avions fourni, semblent ignorer, deux ans après, l'existence des institutions tibétaines en exil et la retraite politique du Dalaï Lama. Nous remarquons que la question du Tibet est régulièrement posée à M. Mélenchon, telle un bouton « polémique garantie » sur lequel on appuie pour générer un moment de politique-spectacle. Nous voudrions plutôt que cette question soit posée sérieusement à chaque invité politique de cette émission.

    Depuis janvier 2012 peu de choses ont changé pour Messieurs Pujadas et Mélenchon. Si ce n'est le nombre d'immolations au Tibet qui a plus que doublé.

    « L’histoire se répète toujours deux fois : la première fois comme une tragédie, la seconde fois comme une comédie » disait Marx. Dans notre cas, il semblerait que l'on passe de la farce d'une politique-spectacle qui il y a un an jouait l'ignorance à une tragédie aujourd'hui qui assume sa volonté de ne rien vouloir connaître et reconnaître au sort du peuple tibétain.

    Notre détermination elle, reste intacte. Forte de soutiens à travers le monde, forte d'une démocratie en exil qui continue de se construire de façon plurielle avec le Tibetan National Congress, la liberté du peuple tibétain vivra !

    Etudiants pour un Tibet Libre, Paris, 28 avril 2013.


    3 commentaires
  • Manifestation pour la libération du Panchen Lama à Paris

    (Plus de détails à venir)


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  • Rassemblement jeudi 25 avril 2013 17:00 – 19:30 

    Place Igor Stravinsky (à coté de Centre Pompidou)
    Metro Rambuteau, ligne 11

    Manifestation : Liberté pour le Panchen Lama : 25 Avril 2013

    Gendhun Choekyi Nyima avait 6 ans lorsque lui et ses proches ont été enlevés par les autorités chinoises. Pourquoi ? Parce qu’il venait d’être reconnu par le système traditionnel tibétain comme étant la réincarnation du Panchen Lama, le deuxième plus haut chef spirituel du bouddhisme tibétain. C’était en juillet 1995. Un an plus tard, les autorités chinoises avouèrent détenir l’enfant. Malgré les fortes pressions de la communauté internationale et des ONG, la Chine a jusqu’à aujourd’hui refusé tout droit de visite au Panchen Lama, prétextant le détenir « pour sa sécurité ». Depuis son enlèvement il y a 18 ans, nous restons donc sans aucune nouvelle du Panchen Lama, de sa famille et des 26 personnes de son entourage, enlevés eux aussi. Le 25 avril 2013, celui qui fut reconnu comme étant le plus jeune prisonnier politique de l’histoire aura 24 ans.

    Où sont-ils? Sont-ils encore vivant?

    Gendhun CHoekyi Nyima, the 11th Panchen Lama, born 25th April 1989. Kidnapped by the Chinese government on 17 May 1995. Since then no news on their whereabouts or health.

    Where are they? Are they still alive?

    Join SFT France on Thursday 25th April, as we commemorate the 24th birthday of the Panchen Lama, and urge China to give answers on where he is.

    Cela fait 18 ans que Le Panchen Lama est emprisonné, nous voulons avant tout avoir des nouvelles de lui et ses proches !

    N'hésitez pas à diffuser la nouvelle et à venir nombreux nous rejoindre!

     

    Liberté pour le Panchen Lama !

    Vive le Tibet Libre !



    Place Igor Stravinsky (à coté de Centre Pompidou)
    Metro Rambuteau, ligne 11

    Evènement FB


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